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08 Jan

Le Cap Horn, entre mythe et délivrance

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Pour la troisième fois en quatre ans, la deuxième en solitaire sur le Vendée Globe (l’autre, c’était sur la Volvo Ocean Race 2017-2018), Jérémie Beyou va franchir le Cap Horn, dernier des trois caps mythiques des courses et records autour du monde. Forcément un moment fort dans la carrière du skipper de Charal, ce que confirme le directeur de course du Vendée Globe, Jacques Caraës, cinq « Cap Horn » à son tableau de chasse : « Si le premier a toujours une saveur particulière, parce que tu as l’impression d’avoir ton « bac de la mer », tous les passages sont mémorables. La petite cerise sur le gâteau, c’est quand tu peux le voir ; personnellement, je l’ai vu trois fois sur cinq, dont une dans du très petit temps au ras des cailloux, on apercevait même les gens qui étaient sur la base chilienne de l’île du Horn ! »

Et à quoi ressemble-t-il ce Horn tant espéré quand on a la chance de le voir ? « Quand tu passes assez loin, tu as l’impression que c’est un caillou avancé sur l’eau, ça fait assez mystique, répond Jacques Caraës. Et ça l’est encore plus quand tu passes de nuit, parce que tu n’aperçois qu’une masse sombre avec la lumière du phare, mais en fait, c’est plus qu’un caillou, c’est une vraie île avec son phare et la maison du gardien, avec lequel, si tu passes suffisamment près, tu peux échanger. Il est d’ailleurs en général assez dérouté quand, lorsqu’il demande d’où on vient et où on va, tu lui réponds la même ville, il ne comprend pas bien ! »

Cap mystique pour certains, le Horn est surtout mythique, pour son histoire – découvert en 1616, il fut, jusqu’à l’inauguration du canal de Panama en 1914, une voie maritime fréquentée par les navires de commerce – et parce que pour les marins des courses et records autour du monde, c’est la porte de sortie du Grand Sud.  « C’est vraiment le cap de la délivrance, poursuit Jacques Caraës, parce que le Sud est un long tunnel ; quand tu t’y engages au niveau du Cap de Bonne-Espérance, tu sais que tu ne vas pas vers la facilité et qu’il faut absolument que tu arrives à en sortir. En plus, dans l’Indien et le Pacifique, ta sécurité, c’est surtout les concurrents autour de toi, alors quand tu passes le Cap Horn, tu sens un vrai réconfort, parce que tu sais qu’il y a plus de bateaux autour de toi et des terres plus proches. »

Cette délivrance se ressent d’autant plus que, très vite, les conditions changent. « La première chose qui frappe, c’est la chaleur qui remonte, le fait de pouvoir commencer à tout faire sécher alors que sur les deux océans que tu as traversés, tout est constamment humide pendant deux mois, explique le directeur de course du Vendée Globe. Pour autant, on ne repasse pas tout de suite en mode régate, il y a une espèce de tombée d’adrénaline qui fait que, pendant quelques heures après le passage du Horn, tu es KO, toute la tension du Grand Sud retombe, ton corps se relâche, tes batteries internes aussi, il faut un peu de temps pour les recharger, le sas de remise en route peut être long. »

Pour la deuxième fois consécutive sur le Vendée Globe, Jérémie Beyou s’apprête donc à revivre ces moments intenses, lui dont Jacques Caraës dit : « Je pense que le passage du Cap Horn va lui donner un regain d’énergie, parce que depuis son deuxième départ des Sables, il n’a pas été aidé par la nature, la météo s’est souvent refusée à lui. Malgré cela, il a continué dans sa ligne de conduite de boucler ce tour, il est vraiment méritant, chapeau ! »