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20 Juil

Jérémie Beyou : « J’ai vraiment hâte de reprendre la compétition »

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Après une semaine de vacances, Jérémie Beyou a retrouvé son IMOCA Charal hier lundi pour se préparer en vue de la Rolex Fastnet Race (Cowes-Cherbourg-en-Cotentin, via le phare du Fastnet, départ le 8 août) qu’il courra, comme la Transat Jacques Vabre en novembre, avec Christopher Pratt. Le skipper de Charal dont l’IMOCA a été remis à l’eau le 27 mai dernier, revient sur les modifications faites sur le bateau après le Vendée Globe et sur ses premières semaines de navigation. 

 

En quoi a consisté le chantier post-Vendée Globe ?

Il y a déjà toute une partie retour d’expérience qui prend du temps. Un échange avec les techniciens est important pour savoir comment telles pièces ont été utilisées, comment telles autres ont pu s’user ou casser, et comment on peut faire encore mieux, à la fois pour ce bateau et pour le suivant (Charal 2). Ensuite, il y a tous les contrôles, avec les expertises par ultrasons menées par Manu Le Borgne, mais aussi beaucoup d’expertises visuelles très poussées. On attend d’avoir tout inspecté pour attaquer tout le démontage qui permet d’ausculter le bateau de fond en comble, d’effectuer tous les changements de pièces prévus et de réparer toutes celles qui le nécessitent. Enfin, il y a toute la partie optimisations : nous avions déjà décidé pas mal de choses avant le départ du Vendée Globe, et notamment les changements sur l’étrave dont le design était finalisé à mon arrivée. Nous avons aussi insisté sur tout ce qui est masses, en rationnalisant les poids embarqués, qui sont forcément moins importants sur une Transat Jacques Vabre que sur un Vendée Globe, le bateau a été ainsi beaucoup allégé. Nous avons également travaillé sur la répartition des masses à l’intérieur.

 

Peux-tu nous dire exactement ce que vous avez fait sur l’étrave et quels sont les gains attendus et déjà constatés ?

L’idée est, que l’étrave, lorsqu’elle vient lécher l’eau en mode volant ou semi-volant, génère à la fois le moins de frein possible et un petit effet de rappel, c’est-à-dire qu’elle rebondit sur l’eau pour de nouveau voler. Nous avions déjà travaillé sur le sujet l’année dernière en la coupant un peu. Cette fois-ci, nous nous sommes inspirés de la Coupe de l’America, nous avons regardé si ce qui avait été fait sur les AC75 serait applicable sur notre bateau.

Nous avons donc essayé de rogner sur l’étrave au maximum de ce que nous permettait la structure sans bouger les cloisons. Ça donne une forme assez sympa en V. Quant aux résultats, ils sont déjà sensibles : en performances pures, le bateau ne va pas forcément plus vite, mais il est plus facile dans son attitude, il force moins dans la mer et redémarre plus rapidement. C’était de toute façon un travail intéressant à faire en vue de Charal 2, ça permet de voir si ça fonctionne, mais aussi de développer nos outils, parce que c’est quelque chose que nous avons simulé sur nos outils dynamiques internes chez BeYou Racing.

 

Vous avez aussi beaucoup travaillé sur les voiles, peux-tu nous en dire plus ?

Un J4 arrive dans la nouvelle garde-robe de l’IMOCA, c’est un grand tourmentin, une voile de tempête, qui peut ouvrir des perspectives intéressantes dans le sens où on démarre la gamme à partir d’une voile plus petite. Nous avons aussi énormément travaillé, en collaboration avec North Sails, sur la grand-voile neuve, assez différente de celle que nous avions. Nous l’avons déjà beaucoup testée, le résultat est très satisfaisant. Nous avons décidé de ne pas refaire tout le jeu de voiles, mais nous avons modifié toutes les voiles existantes, parce que nous sommes passés à la quête de mât (l’inclinaison) à 6 degrés (autorisé par la nouvelle jauge, contre 4 auparavant, voir ci-dessous), ce qui nécessitait de remonter les points d’écoutes, nous en avons profité pour retravailler les voiles sur leurs tailles et leurs volumes. C’est un exercice qui n’est vraiment pas évident, parce qu’il y a des compromis à trouver entre la nécessité de lancer le bateau, ce qui implique d’avoir une voile volumineuse, et celle de limiter la traînée aérodynamique quand le bateau va vite sur ses foils, ce qui passe par une voile plus plate.

 

La nouvelle jauge en vue du prochain Vendée Globe a été adoptée, quelles sont les conséquences pour vous ?

Nous avons de notre côté choisi de passer à cette nouvelle jauge, ce qui voulait dire qu’il nous fallait diminuer un peu la taille des foils – on a dû les rétracter un peu – mais elle nous autorisait à passer à cette quête de mât différente, ce qui permet au bateau d’avoir un comportement plus sain au portant. C’est aussi pour cela que nous avons réparti les masses différemment.

 

Comment se sont passées les semaines de navigation depuis la mise à l’eau le 27 mai ?

Après quelques navigations techniques à Lorient pour vérifier toutes les voiles, nous avons décidé d’aller naviguer quelques jours au large du Portugal pour trouver des conditions de vent portant assez fort et une mer d’alizé un peu cassante. Nous sommes descendus en équipage, ce qui nous a permis déjà de tester des configurations de voiles au portant.

Nous sommes restés deux semaines sur place ce qui nous a permis d’effectuer des navigations à la journée ou de 24 heures très intenses, avec du « testing » pur, comme essayer deux voiles différentes aux mêmes angles, à balayer les angles et les forces de vents pour voir quelles sont les meilleures configurations. Nous sommes très contents d’avoir fait tout ce travail, nous sommes ensuite rentrés en double avec Christopher (Pratt), ce qui nous a permis de nous entrainer pour la Transat Jacques Vabre.

 

Quel est le programme des semaines à venir ?

Le bateau a passé avec succès le test à 90 degrés le 9 juillet. Dans la foulée, avec Christopher, nous avons pris une semaine de vacances en famille, pendant laquelle je suis parti au Pays basque. Nous réattaquons des navigations au large cette semaine pour nous préparer pour le Fastnet que nous allons courir en double. Après une semaine de repos au retour du Fastnet, nous enchaînerons les semaines d’entraînement, tout va aller très vite jusqu’à la Transat Jacques Vabre. A titre personnel, j’ai vraiment hâte de reprendre la compétition.

 

Votre binôme avec Christopher fonctionne-t-il toujours aussi bien ?

Oui, nous sommes bien rodés, nous prenons toujours énormément de plaisir à naviguer ensemble. Cette entente est bien évidemment primordiale, mais ce qui est important aussi, c’est la faculté du co-skipper à bien travailler avec toute l’équipe, c’est le cas de Chris, tout se passe dans la bonne humeur et de façon efficace.

 

Pour finir, un mot sur Charal 2 : où en est le futur bateau ? 

Le moule de coque vient d’être livré chez CDK à Lorient, le drapage a donc débuté. Et en termes de design, nous sommes en ce moment sur le plan de pont et nous finissons de travailler sur les foils, ça avance bien et c’est toujours aussi enthousiasmant !