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31 Août

Le matelotage ou l’art de ne pas faire de nœuds…

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Le matelotage, à bord de l’IMOCA Charal, concerne tous les bouts* et la façon de les travailler jusqu’à atteindre le compromis idéal entre résistance et légèreté. Ce travail d’orfèvre est réalisé sur chaque bout, de la plus petite garcette* jusqu’aux cordages qui retiennent le gréement ou règlent les voiles.

Yann Le Breton est passionné de matelotage et dans son atelier, il vit entouré d’énormes bobines de toutes les couleurs et d’outils propres au matelotage : aiguilles, alènes, épissoirs, couteaux. Il coupe, il épisse*, il étire, et apporte un soin particulier aux finitions qui feront d’une épissure efficace une belle œuvre. Mais Yann ne fait pas de nœuds…

 

 

Plusieurs tonnes de traction 

Au risque de faire tomber quelques idées reçues, Yann est formel, le matelotage est l’art de ne pas faire de nœuds ! «  Sur un bout en Dyneema*, un nœud fait perdre 60% de la résistance. On réalise donc un œil (boucle) : je fais repasser l’extrémité  du bout dans la tresse (cf  photo). Plus la traction est forte, plus la tresse exerce une contrainte telle, que l’œil ne glisse pas ». Ainsi donc, une simple épissure tracte plusieurs tonnes…

A bord de l’IMOCA Charal, il n’y a pas un câble. Tous ont été remplacés par des bouts, y compris pour retenir le mât qui culmine à 27 mètres et supporter la pression exercée par plus de 600 m2 de voiles ! Le Dyneema est 15 fois plus léger qu’un câble et aussi solide, à condition de ne pas y faire de nœud. Enfin, ce n’est pas le diamètre d’un bout qui fait sa résistance, mais sa composition, sa fabrication et la façon dont il est préparé. Ainsi, certaines écoutes* pourraient se permettre d’être moins épaisses mais la main de Jérémie ne pourrait s’accommoder d’une écoute trop fine.

 

 

Travailler le bout sur un banc de matelotage

L’atelier de Yann est un banc de matelotage de 6 mètres sur lequel il prépare ses bouts. Il s’agit d’un très long établi, équipé d’un vérin et d’un winch qui permettent de mettre le cordage en traction pour le travailler au millimètre près. Dans un souci de gain de poids, certains bouts seront privés de leur gaine pour ne conserver que leur âme, comme par exemple toute la partie de drisse* qui reste dans le mât. Les drisses, qui sont libérées de leur charge dès lors que la voile est hissée et bloquée dans un hook*, seront en diamètre 8 mm tandis que les écoutes, supportant des tractions plus longues, seront en 12 mm. Dans la mesure du possible, chaque voile dispose de sa couleur de bout afin de faciliter le repérage lors des manœuvres.

L’IMOCA Charal compte 1700 mètres de bout servant au gréement et aux manœuvres et 300 mètres de garcette pour toutes les finitions. Des sacs compartimentés permettent à Jérémie de ranger ses kilomètres de cordages après chaque manœuvre, pour éviter de faire des nœuds au fond du cockpit. A bord de Charal, Yann auscultera les gaines et les épissures très régulièrement afin de repérer d’éventuelles usures anormales. L’ensemble sera remplacé tous les deux ans.

 

* Lexique :

Bout : cordage (sur un bateau)

Garcette : bout de petit diamètre

Dyneema : sorte de tuyau en tresse de polyéthylène ultra-résistant

Hook : système permettant de bloquer la voile en tête de mât

Episser : entrelacer deux cordages pour les assembler, sans faire de nœud

Drisse : cordage pour hisser une voile

Ecoute : cordage pour border une voile